Entretiens / Interviews / Entrevistas by Marie Lebert - HTML preview

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On peut prévoir que l'on arrivera sans doute, d'ici quelques années, à unesituation semblable à ce qui prévaut dans le monde de l'édition en ce quiconcerne la répartition des différentes langues. Ceci signifie néanmoins queseul un nombre relativement restreint de langues seront représentées(comparativement aux quelques milliers d'idiomes qui existent). Dans cetteoptique, nous croyons que le web devrait chercher, entre autres, à favoriser unrenforcement des cultures et des langues minoritaires, en particulier pour lescommunautés dispersées.

Enfin, l'arrivée de langues autres que l'anglais sur internet, si elle constitueun juste rééquilibre et un enrichissement indéniable, renforce évidemment lebesoin d'outils de traitement linguistique aptes à gérer efficacement cettesituation, d'où la nécessité de poursuivre les travaux de recherche et lesactivités de veille dans des secteurs comme la traduction automatique, lanormalisation, le repérage de l'information, la condensation automatique(résumés), etc.

= Comment voyez-vous l'avenir?

Internet est là pour demeurer. L'apparition de langues autres que l'anglais surce médium constitue également un phénomène irréversible. Il sera donc nécessairede tenir compte de ces nouvelles réalités aux points de vue économique, social,politique, culturel, etc. Des secteurs comme la publicité, la formationprofessionnelle, le travail en groupes et en réseaux, la gestion desconnaissances devront évoluer en conséquence. Cela nous ramène, tel que nousl'avons mentionné plus haut, à la nécessité de développer des technologies etdes outils vraiment performants qui faciliteront les échanges dans un Villageglobal terriblement plurilingue…

*Entretien du 13 mars 2000

= Quoi de neuf depuis notre premier entretien?

Le CEVEIL a cessé la production de ses clips d'information hebdomadaires et deson périodique mensuel.

Cette situation résulte moins d'un changementd'orientation que d'un manque de ressources humaines et financières. La reprisede ces activités, sans être impossible, n'est pas envisagée pour le moment.

= Que pensez-vous des débats liés au respect du droit d'auteur sur le web?

Guy Bertrand: Il est très important de respecter le droit des auteurs et c'estaux auteurs de décider de ce qu'ils veulent en faire. Le web accorde une placede plus en plus grande à la gratuité des usages. Les auteurs ne sont pas tenusde s'y plier, mais de plus en plus d'auteurs s'y adaptent volontairement et avecprofit. Les modèles d'affaires sur le web évoluent très rapidement et n'ont pasfini de le faire. De nouveaux modèles d'affaires se développeront et la place dela gratuité y sera forte, mais les droits des auteurs devront être respectés defaçon innovatrice de la part des auteurs et des fournisseurs de services et decontenus.

Cynthia Delisle: Les droits d'auteur devraient idéalement faire l'objet du mêmerespect sur le web que dans d'autres médias, la radio ou la presse par exemple.Cela dit, internet pose à ce niveau des problèmes inédits à cause de la facilitéavec laquelle on peut (re)produire et (re)distribuer l'information à grandeéchelle, et aussi en raison de la tradition de gratuité du réseau. Cettetradition fait, d'une part, que les gens rechignent à débourser pour desproduits et services qu'ils trouveraient tout naturel de payer dans d'autrescontextes et, d'autre part, qu'ils ont peut-être moins d'états d'âme, dans lecontexte du net, à utiliser des produits piratés.

La problématique du respectdes droits d'auteur constitue, à mon sens, un des enjeux majeurs pourl'évolution du réseau, et il sera certainement très intéressant de voir lessolutions qui seront mises de l'avant à cet égard.

= Comment voyez-vous l'évolution vers un internet multilingue?

Guy Bertrand: Depuis 1998, le commerce électronique international s'est beaucoupdéveloppé et les vendeurs veulent de plus en plus communiquer dans les languespréférées par les acheteurs, ce qui augmentera encore le caractère multilinguedu web. Le commerce électronique ne dominera pas le web, mais son importanceaugmente ainsi que se marque le caractère multilingue du web. Les outils pour lemultilinguisme sur le web sont, hélas!, toujours en retard.

Cynthia Delisle: Je pense que la tendance déjà amorcée en 1998 s'est confirméedepuis et que l'avenir d'internet passe irrémédiablement par le multilinguisme.Internet s'internationalise, et on voit mal comment ce phénomène pourrait seréaliser sans s'accompagner d'une diversification linguistique et culturelle duréseau. Même si l'anglais demeurera sans doute toujours la langue la plusutilisée sur internet, le pourcentage de sites et de documents offerts end'autres langues continuera régulièrement d'augmenter, jusqu'à ce qu'un certain"équilibre" soit atteint.

Par ailleurs, je suis entièrement d'accord avec M. Bertrand lorsqu'il souligneque les outils aptes à traiter cette diversité linguistique ne sont pas encoreau point. La traduction automatique, par exemple, piétine dangereusement depuisnombre d'années… Pourtant, les besoins ne cesseront de croître, d'où lanécessité de multiplier les efforts de R&D (recherche et développement) dans cessecteurs.

= Quel est votre meilleur souvenir lié à l'internet?

Guy Bertrand: Ma première expérience avec le site www.neuromedia.com.

Cynthia Delisle: Le maintien régulier et à moindre coût, grâce au courriel, ducontact avec mes proches lors de séjours prolongés à l'étranger.

= Et votre pire souvenir?

Cynthia Delisle: D'avoir vécu des problèmes de harcèlement (envois répétitifs decourriels personnels non sollicités… c'était il y a plusieurs années, avantque les logiciels de messagerie ne soient équipés de fonctions de filtres!).

*Entretien du 4 juin 2001

= Quoi de neuf depuis notre dernier entretien?

Le CEVEIL termine présentement ses mandats des dernières années sur la promotiondes normes pour la francisation des technologies de l'information et descommunications (TIC). Actuellement, nous n'avons plus d'autres mandats àréaliser par la suite. Le site du CEVEIL affiche, en ce moment, beaucoup denouveaux contenus (rapports, textes de vulgarisation, etc.) et demeurera enligne pour au moins une autre année.

Ceci étant dit, et bien que le comité de direction ne soit plus fonctionneldepuis 1999, le CEVEIL demeure apte à remplir (sous la tutelle du CEFRIO)différents mandats sur la thématique des inforoutes et des langues. Nous sommesdonc ouverts à toute proposition intéressante!

[EN] Guy Bertrand & Cynthia Deslisle (Montreal)

#Respectively scientific director and consultant at the CEVEIL (Centred'expertise et de veille inforoutes et langues - Centre for Assessment andMonitoring of Information Highways and Languages) The CEVEIL, set up in 1995, is a non-profit-making body based in Quebec whosemain purpose is to think about the use and processing of languages oninformation highways, from a French-language viewpoint, through strategicmonitoring activity and creating a network of exchanges and evaluation. TheCEVEIL also focuses on the language industry in general (voice recognition,machine translation and optical character recognition, for example) and relatedfields such as strategic management of data, knowledge management, setting normsand standardisation. The CEVEIL is part of the CEFRIO (Centre francophoned'information des organisations - French-language Centre for Information onOrganisations).

[Interview 23/08/1998 // Interview 13/03/2000]

*Interview of August 23, 1998 (original interview in French)

= What did using the Internet affect the CEVEIL?

First, the Web is one of the reasons for CEVEIL's existence, because we focus onthings like language use and processing on the Internet.

The Web is also where we get most of our information on the topics we'reinterested in. We regularly monitor sites that supply daily and weekly news. Sowe definitely make more use of the Internet than we do other written sources.

We also use electronic mail a great deal to keep in touch with our contributors,to obtain information and carry out projects. CEVEIL is a "network structure"which might not survive without the Internet to link all the people involved init.

The Web is also the most important means for distributing our products to targetclients — sending electronic news to our subscribers, creating an onlinemagazine, and distributing information and documents through our website.

= How do you see the growth of a multilingual Web?

Multilingualism on the Internet is the logical and natural consequence of thediversity of human beings.

Because the Web was first developed and used in theUnited States, it's not really surprising it started out as

— and still is —essentially Anglophone. But this is beginning to change, because most new userswill not have English as their mother tongue and because non-English-speakingcommunities already on the Web will no longer accept the dominance of Englishand will want to use their own language to some extent.

We can envisage, in a few years time, a situation similar to the one inpublishing concerning use of different languages. This means only a small numberof languages will be used (compared to the several thousand that exist). So wethink the Web should try to further support minority cultures and languages,particularly in the case of dispersed communities.

The arrival on the Internet of languages other than English, while demandinggenuine readjustment and providing undeniable enrichment, emphasizes the needfor linguistic tools to cope with the situation. These will emerge from researchand promoting awareness in areas such as machine translation, standardization,searching for information, automatic summarizing, and so on.

= How do you see the future?

The Internet is here to stay. The arrival on it of languages other than Englishis also irreversible. So we have to take that into account from an economic,social, political and cultural point of view. Sectors such as advertising,vocational training, knowledge management, and work in groups or within networkswill have to change. This brings us back to the need to develop really effectivetechnology and tools to encourage exchanges in a truly multilingual globalvillage.

*Interview of March 13, 2000 (original interview in French)

= What has happened since our first interview?

Since then, the CEVEIL has stopped putting out weekly news bulletins and itsmonthly magazine. This is not so much because we've changed direction but ratherfor want of staff and funding. We don't plan to resume those activities for themoment.

= What do you think of the debate about copyright on the Web?

Guy Bertrand: It's very important to respect copyright and it's up to theauthors to decide what they want to do about it. The Web is offering more andmore things for free. Authors don't have to accept that, but a growing number ofthem are choosing to adapt to it and are benefitting. The business models on theWeb are changing very rapidly and will continue to. New ones will spring up witha strong free-of-charge content, but copyright will have to be respected innewer and more original ways by authors and providers of services and content.

Cynthia Delisle: Ideally, copyright should be respected on the Web as it is inother media such as the radio and the written press. However, the Internetraises new kinds of problems here because of the ease that data can be(re)produced and (re)distributed on a huge scale and because of the tradition ofit being available for free. This tradition means people balk at paying forproducts and services they'd find it quite normal to pay for in other situationsand they also perhaps have fewer qualms, in the context of the Net, about usingpirated products. I think respecting copyright is one of the biggest issues forthe future of the Net and it'll certainly be very interesting to see whatsolutions will emerge to deal with it.

= How do you see the growth of a multilingual Web?

Guy Bertrand: Worldwide e-commerce has grown enormously since 1998 andbusinesses are increasingly keen to use the languages of their potentialcustomers, which is going to boost further this multilingual aspect. E-commercewon't take over the Web, but its importance is growing as multilingualismincreases there. But the tools for multilingualism on the Web are unfortunatelyalways one step behind.

Cynthia Delisle: I think the trend which had already begin in 1998 has nowestablished itself and the future of the Internet is definitely going to be amultilingual one. The Net is becoming more international and it's hard to seehow this can happen without it becoming linguistically and culturally morediverse. English will probably always be the Net's most frequently-usedlanguage, but the proportion of sites and pages available in other languageswill steadily increase until a certain equilibrium is reached. I also quiteagree with Mr Bertrand when he points out that the tools to handle thislinguistic diversity are not yet ready. Machine translation, for example, hasmade woefully little headway in recent years. Yet the needs are growing all thetime, which is why we need to step up research and development in these areas.

= What is your best experience with the Internet?

Guy Bertrand: My first one with the site www.neuromedia.com.

Cynthia Delisle: Being in regular touch with my family at little cost throughe-mail while I was abroad for long periods.

= And your worst experience?

Cynthia Delisle: The problem of harrassment, such as constant unsolicitedpersonal e-mails several years ago, before servers installed spam filters.

OLIVIER BOGROS [FR]

[FR] Olivier Bogros (Lisieux, Normandie)

#Créateur de la bibliothèque électronique de Lisieux et directeur de labibliothèque municipale Le site "La bibliothèque électronique de Lisieux" a été ouvert en juin 1996.D'abord hébergé sur les pages d'un compte personnel CompuServe, il est depuisjuin 1998 installé sur un nouveau serveur où il dispose d'un espace disque plusimportant (30 Mo) et surtout d'un nom de domaine. Comme l'explique OlivierBogros, directeur de la bibliothèque municipale de Lisieux (Normandie), "ce siteest entièrement consacré et exclusivement réservé à la mise à disposition sur leréseau (librement et gratuitement) de textes littéraires et documentaires dudomaine public français afin de constituer une bibliothèque virtuelle quicomplète celles déjà existantes." Dès sa création, ce site pionnier suscitebeaucoup d'intérêt dans la communauté francophone parce qu'il montre ce qui estfaisable sur le web avec beaucoup de détermination et des moyens limités.

En 2000, la Bibliothèque électronique de Lisieux aborde une nouvelle étape.LexoTor, lancé officiellement le 27 août 2000, est le résultat d'unecollaboration avec le site "Langue du 19e siècle" de l'Université de Toronto(Canada). Il s'agit d'une base de données qui fonctionne sous le logicielTACTweb et qui permet l'interrogation en ligne des textes de la bibliothèqueclassés en différentes rubriques: oeuvres littéraires, notamment du 19e siècle;brochures et opuscules documentaires; manuscrits, livres et brochures sur laNormandie; conférences et exposés transcrits par des élèves du Lycée MarcelGambier. L'interrogation permet aussi les analyses et comparaisons textuelles.L'initiative du projet revient à Russon Wooldridge, professeur au départementd'études françaises de l'Université de Toronto, suite à sa rencontre avecOlivier Bogros lors du colloque international relatif aux études françaisesvalorisées par les nouvelles technologies d'information et de communication(12-13 mai 2000, Toronto).

[Entretien 18/06/1998 // Entretien 27/07/1999 // Entretien 17/08/2000 //

Entretien 27/05/2001]

*Entretien du 18 juin 1998

= Quel est l'historique de votre site web?

J'ai déjà rapporté dans un article paru dans le Bulletin des bibliothèques deFrance (1997, n° 3) ainsi que dans le Bulletin de l'ABF (Association desbibliothécaires français) (1997, n° 174), comment l'envie de créer unebibliothèque virtuelle avait rapidement fait son chemin depuis ma découverte del'informatique en 1994: création d'un bulletin électronique d'informationsbibliographiques locales (Les Affiches de Lisieux) en 1994 dont la diffusionlocale ne rencontre qu'un très faible écho, puis en 1995 début de lanumérisation de nos collections de cartes postales en vue de constituer unephotothèque numérique, saisie de nouvelles d'auteurs d'origine normande courant1995 en imitation (modeste) du projet de l'ABU (Association des bibliophilesuniversels) avec diffusion sur un BBS (bulletin board service) spécialisé.L'idée du site internet vient d'Hervé Le Crosnier, enseignant à l'université deCaen et modérateur de la liste de diffusion Biblio-fr, qui monta sur le serveurde l'université la maquette d'un site possible pour la bibliothèque municipalede Lisieux, afin que je puisse en faire la démonstration à mes élus. La suitelogique en a été le vote au budget primitif de 1996 d'un crédit pour l'ouvertured'une petite salle multimédia avec accès public au réseau pour les Lexoviens(habitants de Lisieux, ndlr). Depuis cette date, un crédit d'entretien pour lamise à niveau des matériels informatiques est alloué au budget de labibliothèque qui permettra cette année la montée en puissance des machines,l'achat d'un graveur de cédéroms et la mise à disposition d'une machinebureautique pour les lecteurs de l'établissement…. ainsi que la création en cedébut d'année d'un emploi jeune pour le développement des nouvellestechnologies.

= Comment voyez-vous l'avenir?

Internet est un outil formidable d'échange entre professsionnels (tout ce quipasse par le courrier électronique, les listes de diffusion et les forums) maisqui est un consommateur de temps très dangereux: on a vite fait si l'on n'yprend garde de divorcer et de mettre ses enfants à la DASS (Direction de l'aidesanitaire et sociale). Plus sérieusement, c'est pour les bibliothèques lapossibilité d'élargir leur public en direction de toute la francophonie. Celapasse par la mise en ligne d'un contenu qui n'est pas seulement la mise en lignedu catalogue, mais aussi et surtout la constitution de véritables bibliothèquesvirtuelles. Les professionnels des bibliothèques sont les acteurs d'un enjeuimportant concernant la place de la langue française sur le réseau.

*Entretien du 27 juillet 1999

= Quoi de neuf depuis notre premier entretien?

En fait, et pour les deux années à venir, l'essentiel de notre temps estconsacré à la mise en place de la nouvelle médiathèque (avec une réelleintégration des nouvelles technologies) qui ouvrira en janvier 2001.

Nousréfléchissons, toujours dans le domaine patrimonial, à un prolongement du siteactuel vers les arts du livre - illustration, typographie… - toujours à partirde notre fonds. Sinon, pour ce qui est des textes, nous allons vers unélargissement de la part réservée au fonds normand. Le catalogue en ligne n'estpas une priorité.

= Comment choisissez-vous les textes de la bibliothèque électronique?

Les oeuvres à diffuser sont choisies à partir d'exemplaires conservés à labibliothèque municipale de Lisieux ou dans des collections particulières mises àdisposition. Les textes sont saisis au clavier et relus par du personnel de labibliothèque, puis mis en ligne après encodage (370 oeuvres sont actuellementdisponibles en ligne). La mise à jour est mensuelle (3 à 6 textes nouveaux). Pargoût, mais aussi contraints par le mode de production, nous sélectionnons plutôtdes textes courts (nouvelles, brochures, tirés à part de revues, articles dejournaux…). De même nous laissons à d'autres (bibliothèques ou éditeurs) lesoin de mettre en ligne les grands classiques de la littérature française,préférant consacrer le peu de temps et de moyens dont nous disposons à mettre enligne des textes excentriques et improbables.

= Passez-vous beaucoup de temps à la maintenance du site?

La création et la maintenance du site ne sont encore que des activitésmarginales de la bibliothèque municipale. L'essentiel de notre activité restel'enrichissement et la communication sur place des ressources locales(c'est-à-dire des informations physiquement localisées à la bibliothèque), ledéveloppement de la lecture dans les quartiers… La salle multimédia ouverte enoctobre 1996 doit encore trouver son rythme de croisière, la consultation descédéroms et la bureautique devançant souvent l'utilisation d'internet.

= Que pensez-vous des débats liés au respect du droit d'auteur sur le web?

Effectivement tout cela est très important et la législation doit êtrerespectée. Mais n'accusons pas le réseau de tous les maux.

= Comment voyez-vous l'évolution vers un internet multilingue?

Que chacun s'efforce déjà de s'exprimer correctement dans sa langue.

= Quel est votre meilleur souvenir lié à l'internet?

Les courriers électroniques reçus, à propos des textes que nous mettons en ligneet qui témoignent de la vivacité de la langue française sur le réseau.

= Et votre pire souvenir?

Deux jeunes collégiennes (4e ou 3e) faisant des recherches sur la Résistance enFrance, à partir de la station internet de la bibliothèque, sont tombées sur unsite négationniste. Elles n'ont visiblement pas compris pourquoi nous leur avonsinterdit toute copie papier ou disquette dudit site et avons effacé les pages àl'écran.

Tout simplement les mots "révisionnisme" et "négationnisme" leurétaient totalement inconnus. Moralité: le libre accès au réseau, mais accompagnéd'une médiation par le personnel de la bibliothèque. Le pire des maux:l'ignorance!

*Entretien du 17 août 2000

= Quoi de neuf depuis notre dernier entretien?

La médiathèque n'ouvrira ses portes qu'en janvier 2002 et ce chantier va encoremobiliser l'essentiel de mon temps.

Nous poursuivons modestement l'enrichissement du corpus de textes de labibliothèque électronique.

Une collaboration vient de s'engager entre la bibliothèque électronique deLisieux et le site "Langue du 19e siècle" à l'Université de Toronto. Les textesen ligne à Lisieux sont interrogeables en ligne à Toronto sous forme de bases dedonnées interactives. L'initiative de ce projet, baptisé LexoTor, revient à M.Russon Wooldridge à la suite d'un colloque organisé en mai dernier par sonuniversité. Le lancement "officiel" est prévu pour le 27 de ce mois.

= Utilisez-vous encore beaucoup de documents papier?

Je ne crois pas à la mort annoncée du papier. Je l'utilise encore beaucoup soustoutes ses formes. Mais, au contraire de beaucoup, mon rapport à l'informatiquen'a pas entraîné une augmentation de ma consommation de papier, bien aucontraire. Je suis dans ce domaine plutôt adepte du zéro papier.

= Quelle est votre opinion sur le livre électronique?

De quoi parle-t-on? Des machines mono-tâches encombrantes et coûteuses, avecformat propriétaire et offre éditoriale limitée? Les Palm, Psion et autres handet pocket computers permettent déjà de lire ou de créer des livres électroniqueset en plus servent à autre chose. Ceci dit, la notion de livre électroniquem'intéresse en tant que bibliothécaire et lecteur. Va-t-il permettre des'affranchir d'un modèle économique à bout de souffle (la chaine éditorialen'est pas le must en la matière)?

Les machines à lire n'ont de mon point de vue de chance d'être viables que sileur utilisateur peut créer ses propres livres électroniques avec (cf. cassettesvidéo).

= Quelles sont vos suggestions pour une meilleure accessibilité du web auxaveugles et malvoyants?

Autant que possible j'essaie de rendre accessible à tous la bibliothèqueélectronique de Lisieux. Les recommandations du Consortium W3C ne sont pastoujours évidentes à suivre. Les sites textuels ne requièrent pas une chartegraphique sophistiquée à base de Java et autres niaiseries (le summum a étéatteint cette année par le site officiel du Printemps des poètes).

*Entretien du 27 mai 2001

= Quoi de neuf depuis notre dernier entretien?

La base Lexotor devrait pouvoir bénéficier dès ce mois-ci de la dernière versiondu logiciel TACTweb, ce qui rendra beaucoup plus riches et pertinentes lesinterrogations faites.

Pour ce qui concerne Lisieux, le bâtiment de la médiathèque est sorti de terre,le gros oeuvre sera fini fin juin, la livraison est prévue pour novembre. Parcontre l'ouverture initialement prévue pour janvier 2002

sera sans douteeffective fin mars.

Sur le site de la Bibliothèque électronique, le travail se poursuit chaque moisavec la mise en ligne de textes.

J'ai suspendu provisoirement la fabrication dehiboux (e-books, ndlr) au format Microsoft Reader ou Mobipocket. Il faudrait queje trouve un partenariat avec un autre site pour que les textes disponibles enHTML sur notre bibliothèque électronique soient aussi proposés ailleurs dans unformat hiboux multi-plateforme.

A titre personnel j'ai ouvert une autre bibliothèque électronique, Miscellanées,encore en devenir.

CHRISTIAN BOITET [FR]

[FR] Christian Boitet (Grenoble)

#Directeur du GETA (Groupe d'étude pour la traduction automatique), quiparticipe à l'UNLP (Universal Networking Language Programme)

Au sein du Laboratoire CLIPS (Communication langagière et interactionpersonne-système) de l'IMAG

(Institut d'informatique et mathématiques appliquéesde Grenoble), le GETA (Groupe d'étude pour la traduction automatique), dirigépar Christian Boitet, est une équipe pluridisciplinaire formée d'informaticienset de linguistes. Les thèmes de recherche du GETA concernent tous les aspectsthéoriques, méthodologiques et pratiques de la traduction assistée parordinateur (TAO), et plus généralement de l'informatique multilingue.

*Entretien du 24 septembre 1998

= En quoi consiste l'UNLP (Universal Networking Language Programme), auquel le GETA participe?

Il s'agit non de TAO (traduction assistée par ordinateur) habituelle, mais decommunication et recherche d'information multilingue. Quatorze groupes ontcommencé le travail sur douze langues (plus deux annexes) depuis début 1997.

L'idée est de:

- développer un standard, dit UNL (Universal Networking Language), qui serait leHTML du contenu linguistique,

- pour chaque langue, développer un générateur (dit "déconvertisseur")accessible sur un ou plusieurs serveurs, et un "enconvertisseur".

L'Université des Nations Unies (UNU) (Tokyo) finance 50% du coût. D'après notreévaluation sur la première année, c'est plutôt 30 à 35%, car le travail(linguistique et informatique) est énorme, et le projet passionnant: lespermanents des laboratoires s'y investissent plus que prévu.

Un énoncé en langue naturelle est représenté par un hypergraphe dont chaquenoeud contient une "UW"

(universal word, comme match_with(icl>event) oumatch(icl>thing), formés à partir de mots anglais et dénotant des ensembles plusou moins fins d'acceptions), ou un autre graphe, le tout muni d'attributsbooléens (pluralité, modalité, aspects) - chaque arc porte une relationsémantique (agt, tim, objs).

On en est à la version 1.5 de ce standard, il restepas mal à faire, mais au moins douze groupes ont construit chacun une centainede graphes pour le tester.

La déconversion tourne pour le japonais, le chinois, l'anglais, le portugais,l'indonésien, et commence à tourner pour le français, l'allemand, le russe,l'italien, l'espagnol, l'hindi, l'arabe, et le mongol.

Chaque langue a une base lexicale de 30.000 à 120.000 liens UW - lexème.

L'enconversion n'est pas (si on veut de la qualité pour du tout venant) uneanalyse classique. C'est une méthode de fabrication de graphes UNL qui supposeune bonne part d'interaction, avec plusieurs possibilités:

- analyse classique multiple suivie d'une désambiguisation interactive en languesource,

- entrée sous langage contrôlé,

- encore plus séduisant (et encore pas clair, au niveau recherche pourl'instant), entrée directe via une interface graphique reliée à la base lexicaleet à la base de connaissances.

Les applications possibles sont:

- courriel multilingue,

- informations multilingues,

- dictionnaires actifs pour la lecture de langues étrangères sur le web,

- et bien sûr TA (traduction automatique) de mauvaise qualité (ce qu'on trouveactuellement, mais pour tous les couples à cause de l'architecture à pivot) pourle surf web et la veille.

On travaille actuellement sur les informations sportives sur le web, surtout surle foot. On construit une base de documents, où chaque fichier est structuré (àla HTML) et contient, pour chaque énoncé, l'énoncé original, sa structure UNL,et autant de traductions qu'on en a obtenu. Un tel document peut être recherchédans une base en traduisant la question en UNL, puis affiché (le UNL viewerexiste depuis un an) dans autant de fenêtres d'un navigateur web que de languessélectionnées.

= Quelles sont les perspectives?

Le projet a un problème de volume: grande surface, pas assez d'épaisseur